Commentaire de l’Encyclique de saint Pie X, Pascendi dominici gregis, par Dom Delatte

La lettre encyclique _Pascendi Dominici Gregis_ de saint Pie X, promulguée le 8 septembre 1907, constitue une réaction vigoureuse contre le modernisme dans l’Église catholique. Cette encyclique se situe dans le contexte de la crise moderniste, caractérisée par une remise en question profonde des dogmes catholiques.

Le modernisme, selon Pie X, est une synthèse de plusieurs hérésies, marquée par l’agnosticisme, l’immanentisme et l’évolutionnisme. Les modernistes, influencés par des courants philosophiques comme le vital immanence, réduisent la religion à une expression de la conscience humaine, niant ainsi la divinité de Jésus-Christ et la nature surnaturelle de l’Église. Cette approche se rapproche des idées de penseurs comme Alfred Loisy, Édouard Le Roy et George Tyrrell, qui mettaient en doute les fondements traditionnels de la foi catholique.

L’encyclique condamne la tendance moderniste à universaliser la négation doctrinale, visant non plus des points spécifiques de la doctrine mais l’ensemble de la structure dogmatique de l’Église. Cela s’inscrit dans la continuité du Protestantisme, qui avait déjà initié une émancipation de l’individu par rapport à l’autorité ecclésiastique. Le modernisme est ainsi perçu comme l’aboutissement logique de ce processus, caractérisé par une négation totale de la vérité ecclésiastique et une confiance excessive dans l’examen privé et la subjectivité individuelle.

Pour contrer ce phénomène, Pie X insiste sur la nécessité de maintenir la philosophie scolastique thomiste comme base de l’édifice théologique, et sur la mise en place de mesures disciplinaires strictes, incluant l’élimination des professeurs suspectés de modernisme, la censure des publications hérétiques, et l’institution d’un serment antimoderniste pour les clercs et les enseignants[1][2][4]. Cette réaction montre la détermination de l’Église à préserver son dépôt de vérité surnaturelle face à ce qu’elle perçoit comme une menace interne et profonde.
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