Jean-Marie Le Pen a profondément marqué le paysage politique français, particulièrement en ce qui concerne la question de l’immigration. Selon Jean-Yves Camus, spécialiste de l’extrême droite, l’ascension de Le Pen a transformé la manière dont l’immigration est perçue et débattue dans la sphère politique. Cette évolution peut être analysée à travers le prisme de la théorie de la construction sociale des problèmes, développée par les sociologues comme Malcolm Spector et John Kitsuse. Selon cette théorie, des acteurs sociaux et politiques peuvent élaborer et amplifier certaines préoccupations pour les rendre centrales dans le discours public.
Le Pen a réussi à sortir l’extrême droite de la marginalité électorale en faisant de l’immigration un thème majeur de son discours, souvent en l’associant à des problèmes sociaux et économiques. Cette stratégie s’inscrit dans la tradition du populisme de droite, qui cherche à mobiliser les anxiétés et les peurs de la population autour de questions identitaires et de sécurité. Ce populisme, théorisé par des penseurs comme Ernesto Laclau, repose sur la création d’un antagonisme entre le « peuple » et une élite perçue comme déconnectée des préoccupations populaires.
L’héritage de Le Pen se manifeste ainsi dans la durabilité de ces thèmes dans le débat politique français, influençant même les positions de partis plus traditionnels. Son impact est une illustration de la capacité des acteurs politiques à modeler l’agenda public et à redéfinir les termes du débat politique.
Source : https://www.nouvelobs.com/politique/20250107.OBS98707/jean-yves-camus-sans-le-pen-l-immigration-n-aurait-pas-pris-la-meme-place-dans-la-vie-politique.html