Le marché de la fripe, souvent perçu comme une alternative durable à la fast-fashion, se révèle en réalité être intrinsèquement lié à et renforcer les dynamiques de la mode rapide. D’un point de vue économique, la fripe permet à l’industrie textile de continuer à surproduire sans craindre d’être étouffée par ses stocks, comme le souligne l’anthropologue Emmanuelle Durand. Ce phénomène illustre la théorie de la surproduction de Karl Marx, où la logique capitaliste pousse les entreprises à maximiser la production, même si cela génère des surplus invendus.
Sur le plan social, la fripe participe à la logique néo-libérale et consumériste décrite par les théoriciens de la société de consommation, tels que Jean Baudrillard. Les plateformes de revente en ligne, comme Vinted ou Depop, alimentent une hyperconsommation en proposant une offre infinie et en incitant les consommateurs à acheter et à revendre régulièrement, perpétuant ainsi les mécanismes de surconsommation.
Symboliquement, la fripe et la fast-fashion coexistent et se renforcent mutuellement, créant un cycle où les vêtements neufs invendus se retrouvent sur le marché de l’occasion, maintenant la dynamique de renouvellement constant des garde-robes. Cette interdépendance reflète les idées de Pierre Bourdieu sur le capital symbolique, où les choix de consommation sont influencés par des facteurs sociaux et culturels, et où la mode joue un rôle crucial dans la construction de l’identité sociale. En somme, le marché de la fripe, loin d’être une alternative radicale, est un élément intégré dans le système global de la mode, reproduisant et renforçant les mêmes logiques économiques, sociales et symboliques que la fast-fashion.
Source : https://laviedesidees.fr/Ou-vont-nos-vetements