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Biographie
«Princesse et saltimbanque… sorcière ? Voyante ? » Anna Akhmatova (1889-1966), figure majeure de la poésie russe, grande novatrice, aura connu un destin traversé par les tragédies de l’époque stalinienne, et créé une œuvre unique. Le portrait littéraire qu’en offre la romancière Geneviève Brisac est une précieuse introduction (1).
À 17 ans Akhmatova publie ses premiers vers et signe sous le nom d’une grand-mère tatare. La parution de son recueil Le Soir la rend célèbre, à 23 ans, pour son audacieuse moquerie des liens amoureux, elle devient un modèle. Mais, en 1922, elle est censurée, et pour très longtemps. Brisac insère son œuvre dans le champ littéraire du temps, détaille ses liens, personnels et artistiques, avec des auteurs ayant marqué la poésie russe et soviétique du XXe siècle comme Lev Goumilev (son premier mari), Alexandre Blok, Marina Tsvetaïeva, Ossip Mandelstam… Avec certains d’entre eux, dont, au premier plan, Goumilev, elle fondera, dans les années 1910, le mouvement acméiste, qui s’opposait au symbolisme. Les temps s’assombriront, Goumilev sera fusillé en 1921, leur fils déporté, bien des proches disparaîtront — Requiem, Poème sans héros (Gallimard, 2007) s’en feront l’écho…
Brisac fait aussi revivre son amitié salvatrice avec Lydia Tchoukovskaïa, partage de la faculté de croire au poids des mots, compréhension de ce que signifie se résoudre à changer un mot pour un autre plus métaphorique (2). La biographe, qui souligne combien le rythme est important en littérature, relate l’enchaînement des moments déterminants de l’existence d’Akhmatova, en touches précises — jusqu’aux visites d’une voisine, une délatrice chargée de signaler ses dérives « poétolitiques ».
L’écrivain mexicain Alberto Ruy Sánchez choisit cette femme, agente de la Guépéou, comme narratrice de son ouvrage consacré à Akhmatova (3). L’espionne a constitué un « dossier », qui permet de « zoomer » dans les replis de l’existence d’Akhmatova, composant une mosaïque de souvenirs, de conversations et d’impressions ; passent les proches, les pairs, mais aussi Joseph Staline, qui se rêvait poète. Collage de fragments, d’extraits d’Alexandre Pouchkine ou de Goumilev, de documents d’archives, de photographies, de dessins, on entre dans l’intimité de vies saisies par des temps sans pitié. Akhmatova n’a pas plié. Grâces soient rendues aux écrivains qui l’ont évoquée, et aux traducteurs qui auront accompagné sa voix (4).
Odile Belkeddar
(1) Geneviève Brisac, Anna Akhmatova, portrait, Seghers, Paris, 2024, 176 pages, 19 euros.
(2) Lydia Tchoukovskaïa, Entretiens avec Anna Akhmatova, traductions de Lucile Nivat, Geneviève Leibrich et Sophie Benech, Le Bruit du temps, Gouville-sur-Mer, 2019, 1 300 pages, 39 euros.
(3) Alberto Ruy Sánche