Le cas d’Otto Rösch illustre les complexités et les paradoxes de la reconstruction politique en Autriche après la Seconde Guerre mondiale. Né en 1917, Rösch a été membre de la Hitlerjugend et de la SA, et il a rejoint le Parti national-socialiste (NSDAP) en 1940. Après la guerre, il a été arrêté pour son implication dans une organisation nationale-socialiste clandestine, mais il a été acquitté faute de preuves.
Cette transition de Rösch d’un militant national-socialiste à un haut fonctionnaire du Parti socialiste autrichien (SPÖ) reflète une dynamique plus large dans la politique autrichienne de l’après-guerre. Le SPÖ, sous la direction de Bruno Kreisky, a intégré plusieurs anciens membres du NSDAP dans ses rangs, une stratégie qui peut être analysée à travers le prisme de la théorie de la dénazification et de la reconstruction de l’État.
D’un point de vue théorique, cette intégration peut être vue comme une forme de pragmatisme politique, similaire à la notion de « realpolitik » de Henry Kissinger, où les considérations de pouvoir et de stabilité l’emportent sur les principes idéologiques. Le SPÖ a nécessité des cadres politiques expérimentés, et l’intégration d’anciens nationaux-socialistes a permis de combler ce vide, malgré les controverses que cela a générées.
Cette approche est également éclairée par la théorie de la « réconciliation nationale » qui met l’accent sur la nécessité de passer page sur le passé pour reconstruire la société. Cependant, cette stratégie a également entraîné un silence gênant sur le passé national-socialiste, comme le souligne le débat autour du passé de Kurt Waldheim en 1986, qui a marqué un tournant dans la mémoire collective autrichienne.
En somme, le cas Rösch met en lumière les compromis et les dilemmes moraux et politiques auxquels les sociétés doivent faire face lors de la reconstruction après des régimes autoritaires, et comment ces choix influencent la mémoire collective et la stabilité politique.
Source : https://www.revue-elements.com/otto-rosch-le-passe-trouble-du-socialisme-autrichien/