La publication des *Fleurs du mal* de Charles Baudelaire en 1857 a déclenché une tempête de controverses qui reflètent les tensions entre la créativité artistique et les normes morales de l’époque. Le recueil, caractérisé par ses thèmes de sensualité, de mort et de rébellion, a été jugé outrageant à la morale publique et aux bonnes mœurs. Le procès qui s’est ensuivi, mené par le procureur général Ernest Pinard, a abouti à la condamnation de Baudelaire et de ses éditeurs, les obligeant à payer des amendes et à supprimer six poèmes jugés particulièrement scandaleux : « Les Bijoux », « Le Léthé », « À celle qui est trop gaie », « Lesbos », « Femmes damnées » et « Les Métamorphoses du vampire ».
Cette affaire illustre le conflit entre l’expression artistique et la censure, un thème central dans la théorie de la liberté d’expression de John Stuart Mill. Selon Mill, la liberté d’expression est essentielle pour le progrès de la société, car elle permet la confrontation d’idées et la recherche de la vérité. La condamnation de Baudelaire soulève des questions sur les limites de la liberté d’expression et la manière dont la société définit et impose ses normes morales.
La censure des *Fleurs du mal* jusqu’en 1949, date à laquelle la Cour de cassation a annulé la condamnation, montre comment les œuvres d’art peuvent être perçues comme subversives et comment les sociétés évoluent dans leur perception de ce qui est acceptable. Ce cas est également éclairant à la lumière des théories de Michel Foucault sur le pouvoir et la surveillance, où l’État exerce son contrôle sur les discours et les pratiques culturelles pour maintenir l’ordre social.
En somme, l’histoire des *Fleurs du mal* et de leur censure met en lumière les complexités de la relation entre l’art, la morale et la loi, et soulève des questions fondamentales sur la liberté d’expression et la régulation des œuvres culturelles.
Source : https://www.revuedesdeuxmondes.fr/inedit-lettre-de-baudelaire-listant-les-poemes-censures-des-fleurs-du-mal/